A la 41ème session du Conseil des Droits de l’homme qui se tient du 24 juin au 12 juillet 2019, la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à l’éducation, Koumba Bolly Barry a présenté son rapport au Conseil le mercredi 26 juin 2019. Elle examine dans ce rapport la mise en œuvre du droit à l’éducation et de l’Objectif de Développement Durable 4 (ODD 4)face à l’importance croissante des acteurs privés dans le domaine de l’éducation.

Une privatisation de l’éducation s’est installée progressivement dans les pays d’Afrique et continue de croître. « Un élève sur 4 en âge de fréquenter l’écoles primaire devrait être scolarisé dans le privé en 2021 en Afrique subsaharienne », selon la prévision des auteurs du rapport mondial de suivi de l’éducation pour 2017-2018. De nombreux pays illustrent ces statistiques. En effet, Koumba Boly Barry indique qu’au Kenya par exemple selon les statistiques officielles, le nombre d’écoles privées y est passé de 385 en 1998 à 8 917 en 2013, soit une augmentation de 2 216 %. Et quant à celui des écoles primaires, il est passé de 16 971 en 1998 à 21 205 en 2013, soit une augmentation de 24,9 %.

Selon la même source, le Maroc lui, a vu son taux de fréquentation des établissements privés du primaire, plus que triplé en moins de quinze ans, passant de 4 % en 1999 à 14 % en 2013.

Le phénomène de la privatisation croissante n’est pas présente qu’en Afrique seulement. Les Etats-Unis d’Amérique connaissent ce phénomène à travers les écoles « sous chartes ». Les écoles sous charte (charter schools) sont des écoles financées par des fonds publics mais gérées par le secteur privé. La Rapporteuse spéciale des Nations Unis mentionne que la proportion d’écoles publiques devenues écoles sous charte est passée de 2 à 7 % entre 2000 et 2015. Dans certains districts, ces établissements accueillent jusqu’à 93 % des élèves du primaire et du secondaire.

A la suite de ce bref état des lieux de la privatisation, Koumba Boly souligne que selon leur nature et leurs objectifs, les acteurs privés peuvent contribuer à la réalisation du droit à l’éducation. Ils peuvent également favoriser notamment le respect de la diversité culturelle en proposant de nouvelles formes d’éducation. Le sous-financement chronique de l’enseignement public, l’essor rapide et non réglementé des acteurs privés, en particulier ceux à vocation commerciale, menacent toutefois la mise en œuvre du droit à l’éducation, pour tous et la réalisation de l’objectif de développement durable.

Face à ces observations, des recommandations concernant l’obligation qui incombe aux Etats de garantir et de financer un enseignement public, ainsi que des suggestions et des solutions concrètes sont mentionnés dans le rapport. En termes de suggestions, il s’agit entre autres pour les Etats d’accroître sensiblement les fonds alloués à l’enseignement public. Ces Etats sont invités également à fournir les ressources nécessaires pour faire appliquer leur réglementation en matière d’éducation, en particulier celle concernant les établissements à but lucratif afin d’éviter par ailleurs la marchandisation dans le domaine.

De l’avis de Koumba Boly Barry, toutes les parties prenantes du secteur de l’éducation ; société civile, enseignants, syndicats, pouvoirs publics, donateurs, etc. doivent collaborer dans le cadre de l’élaboration du suivi et des politiques en matière d’éducation afin d’offrir aux populations un accès équitable et gratuit à l’éducation de qualité..


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