Le 13 février 2020, s’est tenu à Paris dans les locaux du Syndicat National de l’Enseignement du Second degré (SNES) un atelier de la Coalition Education sur le défi de l’éducation publique de qualité dans les pays en développement. Il s’est agi durant cette rencontre de sensibiliser les acteurs français de l’éducation dans le monde aux Principes d’Abidjan sur le droit à l’éducation, mais également d’encourager une réflexion ouverte, informée et critique entre les principales parties prenantes en France sur le droit à l’éducation publique, la question du financement de l’éducation et de l’implication des acteurs privés.

D’entrée de jeu, Sylvain Aubry, de l’Initiative Mondiale des Droits Sociaux Economiques et Culturels et aussi membre du Comité de pilotage du Réseau francophone contre la marchandisation de l’éducation, a démontré l’évolution de la part du privé dans l’éducation aussi bien en Afrique qu’aux Etats Unis durant ces 20 dernières années. (Kenya on est passé de 2 à 30% d’écoles privées en moins de 20 ans). Selon lui, dans cette croissance galopante de la privatisation de l’éducation, les écoles qui posent réellement des inquiétudes sont les écoles commerciales et malheureusement beaucoup d’acteurs comme la Banque Mondiale, Aid Agencies soutiennent l’expansion des acteurs privés car selon eux l’école privée est une solution aux problèmes d’éducation.

Ainsi l’aide internationale incite souvent au développement du secteur privé, le secteur privé étant selon eux, indispensable au développement de l’éducation en Afrique, a souligné Marie-France Lange, chercheur au CEPED et membre du Réseau de recherche francophone sur la privatisation de l’éducation.Madame LANGE n’a pas manqué de souligner que dans ce processus de généralisation de l’enseignement primaire accéléré dans l’espace francophone (plus de 40% au Burkina), règnent de très fortes inégalités selon les caractéristiques socio-économiques des parents. Force est de constater une dégradation de la qualité de l’éducation causée en partie par le manque de contrôle des Etats dans la croissance des écoles privées. Et face à cette problématique il y’a malheureusement l’absence de recherches spécifiques sur la thématique qui pouvaient permettre une analyse de ces écoles privées.

Quelles positions de la France et de la Coopération internationale ?

« Durant ces dernières années plusieurs instances ont souligné la croissance importante des acteurs privés dans l’éducation, note Delphine DORSI, de l’ONG Droit à l’Education, et également membre du Comité du Réseau Francophone contre la marchandisation de l’éducation, note que. Il y’a eu entre autres les Déclarations Antananarivo et d’EREVAN des Sommets de la Francophonie respectivement en 2016 et 2018 grâce à une forte mobilisation et d’actions de plaidoyer du réseau francophone contre la marchandisation de l’éducation, et aussi l’adoption des principes d’Abidjan en 2019 où ces textes ont été reconnus par plusieurs instances telles que le Conseil des droits de l’homme, etc.

Par ailleurs Madame Dorsi souligne qu’au niveau de la coopération internationale, le Partenariat Mondial pour l’Education dans sa stratégie de collaboration avec le secteur privé a annoncé en juin 2019, s’engager à ne pas financer les acteurs privés dans l’éducation. Elle ajoute cependant qu’au niveau de la France, l’une des branches « PROPARCO » finance les acteurs privés.  Au niveau de la société civile, un rapport d’étude questionnant ce financement de la France à travers PROPARCO est soumis à signature.

Et quelle mobilisation et stratégie de la société civile donc pour répondre à ces différents défis ?

La Coalition Éducation, en tant que représentante de la société civile française engagée sur les questions d’éducation au niveau international, mène un dialogue continue avec les pouvoirs publics français pour veiller à ce que le renforcement de l’éducation publique de qualité reste prioritaire et que la régulation des acteurs privés soit effective dans le cadre la politique de coopération de la France. Mais au plus large, deux collectifs existent comme étant des réponses à la marchandisation croissante de l’éducation et des systèmes éducatifs au niveau francophone et international. Il s’agit du consortium international sur la privatisation dans l’éducation (actions de Plaidoyer international sur la privatisation de l’éducation auprès des acteurs internationaux tels que l’ONU, la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement, etc. ; Analyse du  Droit international des droits de l’Homme sur la thématique de la privatisation) et du réseau francophone contre la marchandisation de l’éducation (interpelle les chefs d’Etats francophones sur le phénomène de la marchandisation de l’éducation et ce, via la forte mobilisation des membres qui sont des chercheurs, acteurs associatifs et syndicaux, etc).

 Les participants présents à cette rencontre ont à l’issue de ces constats et échanges, procédé à l’élaboration d’une feuille route 2020-2021 pour des actions de plaidoyer portant sur la loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (LOP-DSI) pour que la France s’engage à ne pas financer les acteurs privés.

Environ une trentaine d’acteurs de la société civile ont pris part à cette rencontre parmi lesquels on compte des membres de la Coalition Education, des membres du Comité de Pilotage du Réseau Francophone contre la marchandisation de l’éducation, des ONG françaises telles que Oxfam, Care, et des chercheurs du Réseau de Recherche Francophone sur la privatisation de l’éducation.


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